Ravie de partager ceci avec vous
La bigorexie … quand le sport devient une addiction.
« Les désirs modérés donnent les grands contentements ; l’excès en tout porte dommage. » .
Il y quelques années j’avais la très grande chance de ne jamais travailler le matin ou presque. C’est le moment que je choisissais pour sortir courir. J’habite dans un endroit ou il est facile de s’isoler et pas un jour ne passait sans que j’enfile mes runnings pour m’évader pensé – je, et avoir ma dose de plein air. C’était le moment ou j’arrivais à refaire le monde toute seule, je partais avec un camelback pour être tranquille et j’étais arrivée assez rapidement à courir 1h30 à 2h00 quotidiennement avant de faire quoique se soit d’autre. Été comme hiver – avec parfois des températures très négatives, j’avais fini par trouver normal d’être courbaturée, et presqu’inquiète ou tout au moins « légèrement » coupable lorsque ce n’était pas le cas.
Une époque « bénie entre toutes » (!) ou j’ai usé un nombre phénoménal de baskets, testé nombre de boissons de l’effort, avec ou sans gluten, découvert mon intolérance au gluten, parcouru des centaines de bornes et participé à une course pédestre par semaine – le dimanche matin étant sans concession le jour du déplacement; parfois très loin de la maison pour être au départ de tout ce qui me tombait sous les yeux lors de mes recherches en début d’année, au moment de la sortie des calendriers des courses hors stade.
J’avais fini par choisir uniquement les distances au-delà de 20 kilomètres, parcours nature, pour éviter les lundi trop douloureux, après avoir couru sur route. Ma vie tournait exclusivement, autour de la course à pieds. Mes perfs étaient absolument sans intérêts, mon seul but étant d’être dans l’effort. Au départ. Dans les starkings blocks, organisée, prête. Au taquet.
Violoncelliste, j’avais la chance de partir en tournée (toujours avec mes baskets), et les décalages horaires ni les coups de mous dûs aux répétitions tardives, n’avaient raison de mes soi-disant entrainements. Je « kiffais » réellement être dehors avant tout – et j’arrivais au petit déjeuner fraiche et enthousiaste. Les rares fois ou le réveil n’avait sonné je m’arrangeais pour profiter de l’heure du repas (que je sautais allègrement), pour aller courir et avoir le temps de prendre une douche avant de reprendre le travail avec tout le monde. J’étais de toutes manières persuadée d’avoir 5 ou 6 kilos en trop, une image extrêmement dégradée de mon physique et la certitude de ne pas m’entrainer suffisamment malgré tout.
Et puis … un été alors que j’étais inscrite sur plusieurs triathlons depuis des mois, j’ai ressenti de drôles de choses.
Ma tête, mon corps… fatigue subite. Au point de n’avoir plus aucune envie. AUCUNE.
Pas envie de dormir. Pas envie de manger. Pas envie de courir ou de bouger. Rien.
Pas envie de dormir mais… surtout impossible de dormir.
Pas envie de manger mais la tête qui tourne comme pour une hypoglycémie.
Plus du tout de pêche. RIEN.
- Sauf… une transpiration délirante, nuit et jour. Surtout la nuit d’ailleurs – encore d’avantage que depuis … j’avais oublié depuis combien de temps je transpirais de la sorte. Mais de toutes manières c’était devenu pire encore.
Plus de projets. RIEN.
- Sauf … une angoisse grandissante.
Et puis j’ai dû déclarer mon premier forfait sur le triathlon des Settons que je n’ai pas couru cette année-là alors que tout le club était présent et que l’ambiance était comme d’habitude extraordinairement conviviale.
« Sagement » ou plutôt sans alternative j’ai accepté de ne pas courir, de faire un break – j’ai réellement eu peur, et enfin senti que j’avais atteins une limite – ma limite. Pourtant … 2h00 de sport par jour 365 jours sur 365 … c’est finalement peu. C’est ce dont j’étais absolument convaincue.
Le temps – pas très long d’ailleurs – a passé et puis l’énergie est revenue, un peu. J’ai pu courir le triathlon de Mâcon et de plus petits formats. Mais quelques chose était éteint.
Il a fallu les mois d’automne puis l’hiver suivant pour que tout semble rentrer dans l’ordre.
Et … j’ai bêtement recommencé. Je dis bêtement parce-qu’un matin du mois de mai (prequ’un 1 après ) en sortant de l’hôtel pour mon footing de 2h00, j’ai ressenti une douleur dans la fesse gauche. Que j’ai prise pour une petite contracture, normale puisque de nouveau j’étais un puit de douleur sans même m’en rendre compte. J’ai couru ce matin-là en imaginant qu’une fois «échauffée « ça allait passer. J’ai couru … moins longtemps que prévu et suis rentrée pour m’étirer !! Parce-qu’à cette époque – bénie entre toutes – en plus de la course, je m’étirais longuement en rentrant. Mais ce jour-là, je n’ai pas pu m’étirer comme je le souhaitais.
Et j’ai commencé à craindre de ne pas courir ce week end – là. En le regrettant déjà, car j’étais inscrite sur une course en relais, super sympa : « La Ronde des Clochers » : 72 kilomètres à réaliser en équipe, on termine tous ensemble sur les 4 derniers. C’est la fête … Alors en plus de la douleur c’est installée la honte de devoir annoncer que j’allais pénaliser 6 ou 7 personnes. Je n’ai pas pu porter ma valise le lendemain et j’ai eu bien du mal à tirer la housse de mon violoncelle (pourtant sur roulettes), dans les couloirs interminables de la gare Montparnasse.
L’ami kiné qui m’a reçue ce soir-là m’a confirmée qu’il fallait déclarer forfait pour la Ronde, et conseillé d’attendre quelques jours avant de faire un scanner.
Je n’ai pas pu courir du tout cet été là. Impossible de porter quoique ce soit. Impossible de faire du vélo. Mais j’avais un rameur, alors j’ai ramé. La douleur s’estompait, mais quelque chose était toujours là. Je me sentais fragile.
Quand j’ai pu discuter avec le médecin qui avait réalisé le scanner, le mois de septembre était bien entamé. Il m‘a longuement regardée et m’a demandé si j’avais changé quelque chose dans ma foulée avant que cela ne survienne. Effectivement. J’avais commencé à me poser des questions sur mes perfs, je déroulais d’avantage, je buvais moins et surtout je m’étirais.
Il m’a simplement dit que j’avais une chance inouïe que la fracture de l’ischium gauche soit consolidée étant donné ce que j’avais quand même fait cet été là !
J’ai gardé le document. Il me suffirait d’y penser pour ralentir si je sentais de nouveau un emballement. Mais … je ne me suis plus jamais emballée. Fracture de fatigue du bassin : il n’avait jamais vu ça.
L’année suivante je me suis inscrite dans une salle de fitness… il a fallu 4 semaines à l’un des coachs pour tirer la sonnette d’alarme.
« N’en fais pas trop …! »
« ?? » ça m’a vexée.
Je me suis demandée de quoi il se mêlait. Et puis il m’a proposé me donner des conseils plus personnels pour que je « décroche » … parce-que le problème était là. J’étais totalement camée. Passée tout près de l’overdose avec la phase de surentrainement, passée très près de la catastrophe irréparable si ma fracture s’était consolidée dans un axe loufoque …
Je lui doit d’avoir su m’orienter sur une pratique « un peu » plus réfléchie.
Mes performances, en dehors de ma joie à pratiquer les cours co en salle, ont pulvérisé tout mes espoirs car je suis passée en moins d’un an de 4h55 à 3h42 sur marathon, avec une récupération harmonieuse physiquement et psychologiquement – et j’ai continué à progresser tranquillement ensuite – sans plus jamais d’angoisse, ou de douleur; cerise sur le gâteau mon image s’est restaurée doucement sans que j’y pense.
Je sais que j’ai eu beaucoup de chance.
A suivre .